Les réjouissances à l’École


Les promos se succédant très normalement, la promo 53 a eu la charge de l’organisation de deux « revues » traditionnelles :

- début décembre 1954, la revue Barbe,

- au printemps 1955, la revue Gamma accompagnant le Point Gamma.

Bien entendu, la promo a également participé à l’organisation des manifestations correspondantes de la promo 52.

Pour la revue Barbe, une anecdote est racontée par Yvon Bastide :

« Fin 1954, Sacha Guitry est en train de tourner son film « Napoléon », et quelques cocons préparent la « revue Barbe ». Coïncidence des événements aidant, l’idée vient très vite : on va prendre Napoléon comme thème de la revue, il n’y a qu’à demander les costumes du film, à la Kès de s’en occuper.

Le ciné-club de la promo est animé par Paul Vecchiali, passionné de cinéma (qui y consacrera sa vie après quelques années militaires). Il dispose de quelques contacts et nous prend un rendez-vous… sur les lieux du tournage. Nous sommes reçus par le Maître en personne (l’entourage nous a bien recommandé de l’appeler ainsi) ; il est en train de tourner les dernières scènes, qui sont celles du début du film. Nous assistons donc à ce tournage, répété plusieurs fois, et c’est assez impressionnant (apparemment, il n’est jamais content, même de lui).

Mais, finalement, il nous demande ce que nous voulons. Je le lui explique en quelques mots, avec un peu de brosse à reluire sur le trajet. Il semble avoir déjà réfléchi à la réponse, qui ne se fait pas attendre : peu de temps après la Libération, il avait accepté de participer à une campagne de Kès mais l’entrée de l’École lui avait été refusée par suite des soupçons qui pesaient sur son comportement pendant l’Occupation. Il est d’accord pour nous prêter les costumes à condition que nous lui apportions une lettre d’excuses signée du Général !

Retour à l’École, réflexion sur comment s’y prendre : il est exclu que le Géné accepte d’écrire une lettre d’excuses, reste à lui présenter la demande… À notre grand étonnement, ça se passe assez bien : qu’attendez-vous de moi ? Et on rédige ensemble une lettre dans le genre « le Général commandant l’École autorise les élèves à solliciter de Monsieur Sacha Guitry, etc… ». Nouveau rendez-vous, nouvelle attente pendant le Maître enregistre une séquence (que je n’ai pas retrouvée ensuite sur le film), nous remettons la lettre qu’il n’ouvre même pas et il nous congédie en nous disant de nous adresser à quelqu’un d’autre qui nous donnera les coordonnées utiles.

Mission accomplie, nous sommes plutôt satisfaits du résultat. La revue aura beaucoup de succès avec ces costumes prestigieux et un très beau programme, mais la conclusion est inattendue : je reçois la facture de la location, plutôt salée à mon goût. Je réponds que Monsieur Guitry les a mis à notre disposition gratuitement mais le loueur ne veut rien savoir, et nous transigeons finalement pour un montant réduit de 50 %. Heureusement, nous avons bien vendu le programme ! »


Napoléon le petit Bazof
Le programme
Livre d'or
Costumes civils

Les costumes civils

Costumes militaires

Les costumes militaires


En ce qui concerne la revue Gamma, notre inspiration sera de nature différente :

« En mai 54, nous sommes invités en permanence dans un petit théâtre de la rue Champollion, le théâtre du Quartier Latin, à voir une pièce de Guillaume Hanoteau, « la Tour Eiffel qui tue », où les X n’ont pas le beau rôle : au moment de la construction de la tour, ils opposent des arguments « techniques » pour expliquer qu’elle ne pourra pas tenir, et en profitent pour régler quelques comptes, en particulier avec les Centraliens. Il s’agit d’une « comédie bouffe », et les couplets de Van Parys, avec des paroles de Jean Marsan, sont faciles à mémoriser. La mise en scène et l’affiche sont de Michel de Ré qui joue dans la pièce, aux côtés d’une petite débutante, Annie Girardot. La pièce, courte, est jouée en complément d’une autre, dénommée « Les Valois » ou « La reine-mère », qui raconte sous forme humoristique les malheurs de Catherine de Médicis et de ses enfants… Nous profitons d’une invitation permanente – il suffit de venir en U. Un soir, nous sommes photographiés en compagnie des «acteurs qui jouent les faux polytechniciens dans la pièce (sur la photo, Poggi, Catillon, Bastide et Chevassus) :


Les faux polytechniciens rencontrent les vrais

Lors du « bahutage » de la promo 54, nous mettons dans la « course au trésor » la recherche du disque souple qui, pendant les entractes, servait de fond sonore, ainsi qu’un programme du spectacle avec une signature de Michel de Ré :

Dédicace de Michel de Ré

Le thème de la pièce est repris pour la revue Gamma ; Michel de Ré nous autorise à utiliser l’affiche et la couverture du programme, et nous nous autorisons à utiliser la musique de Van Parys pour nos couplets à nous, tout en en conservant d’ailleurs quelques-uns des siens. Le texte est écrit en grande partie par Michel Borghini. Le programme est proposé par un binet qui vend en même temps le disque Philips de la pièce. Il contient, en particulier, « l’hymne des Polytechniciens » que nous reprenons à plusieurs reprises car nous ne sommes pas vexés :

C’est l’École Polytechnique Vive les Gamma, les Béta

Tous les gens qui nous font la nique Sont autant de gros bêtas

Grâce aux équations De tous les degrés

Nous gouvernerons un jour l’univers

Tout le monde aura Bon gré ou mal gré

Le bicorne, le binocle et le teint vert


Refrain : Bicorne, binocle et binôme

Voilà les symboles de l’X - Boles de l’X

Bicorne, binocle et binôme,

Voilà quels sont nos trois points fix

Vive notre chère École

Paradis des grands cerveaux

Hors de amphis et des colles

Les hommes sont tous des veaux

Couverture programme revue Gamma



Couverture du programme de la revue Gamma

Texte de Michel Borghini

Texte de Michel Borghini
Texte de Michel Borghini (suite)


Texte de Michel Borghini (suite)


Le 20 février 2006, en souvenir de la revue Gamma 1955, notre p'tit maj Hubert Lévy-Lambert a invité toute la promo à une reprise, spécialement faite pour nous,  de la pièce « La Tour Eiffel qui tue », suivie d'un cocktail au théâtre du Gymnase. Michel Borghini, récemment disparu, était présent.

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